Persée, (8 x 8) . 8, par exemple

Feinte ou leurre, paradoxe : localement, on y voit deux versants, un mat et un brillant, ils s’esquissent et s’esquivent car globalement les 2 faces sont en continuités et le dessin est unilatère. Il se réduit à être une bande nouée et striée de fentes. Il est meuble, comme une terre peut l’être (on peut en transformer la forme) mais aussi en tant qu’il se laisse mouvoir et tourner sur lui-même.

Depuis plusieurs années, le nouage en huit me travaille inlassablement. Je décidai de resserrer la question, peut-être d’en faire le tour. La répétition allait-elle épuiser le huit ? Je commençais à répéter l’objet jusqu’à en obtenir 9 puis 16. Où s’arrêter ? Plutôt, quand ? Le plus simple était de s’en tenir à un nombre de décisions minimum. Le huit étant déjà donné, je m’y suis tenue. Qu’allait produire un mur de 8 par huit nouages de 8 « identiques » ? Installer, réinstaller un mur de 8 : une vie des formes se tient dans la réserve. Et en même temps ne se satisfaire d’aucune forme. Celle donnée lors d’un accrochage, l’est à perte, puisqu’elle est en définitive non répétable à l’identique.

 

 

Cet objet a une certaine élasticité, du répondant aux tensions et aux forces extérieures. Les traits de stylet se répètent tout le long de la surface et la strient dans la largeur. Trancher, c’est tracer un écart. Les incises, quasi-coupures, insistent en réalité sur la continuité du bord qu’elles épargnent. L’objet est animé d’une résistance qui lui est propre. La surface courbée, fendue, ne prend forme que lorsqu’elle est épinglée au mur. On peut y piquer – sans percer la surface – comme dans le creux d’une boutonnière, des punaises à tête large, noires et brillantes. Et si par mégarde, ce nœud, qui ne manque pas de ressort, se déboutonne ; alors il n’y a plus qu’à rejouer ! Chevelure, ou bouclier, miroir noir, la surface se courbe en saillie et en concavité, les fentes s’entrouvrent suivant les tensions opérées par l’accrochage tout en négociant avec sa résistance, son élasticité et la gravité. Il n’y a aucune représentation à lire mais seulement un regard à pratiquer, et c’est cette pratique qui lui donne sens. Elle en passe par le corps, non pas en tant que corps représenté mais en tant que cela engage la jouissance du toucher et de la vue. Un glissement du regard vers le toucher qui invite à un corps à corps avec le nœud.